Penser le futur de la création : tendances et défis

Alors que la technologie et l’intelligence artificielle s’ancrent peu à peu dans le paysage de la création, une question se pose : comment former les futurs professionnels à conjuguer sensibilité artistique et maîtrise des nouveaux outils ? Pour en savoir plus, nous avons rencontré Gilles Poplin, directeur de Penninghen, une école qui, depuis 1956, fait […] L’article Penser le futur de la création : tendances et défis est apparu en premier sur JUPDLC.

Jan 29, 2025 - 11:26
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Penser le futur de la création : tendances et défis

Alors que la technologie et l’intelligence artificielle s’ancrent peu à peu dans le paysage de la création, une question se pose : comment former les futurs professionnels à conjuguer sensibilité artistique et maîtrise des nouveaux outils ? Pour en savoir plus, nous avons rencontré Gilles Poplin, directeur de Penninghen, une école qui, depuis 1956, fait rimer exigence créative et pragmatisme professionnel.

Comment s’immiscent ces nouveaux enjeux dans les enseignements et les pratiques ? Comment faire le lien entre tradition et modernité, entre développement sensible et technologie ? Depuis la place du dessin comme langage fondamental, en passant par l’importance du don de soi et des défis à relever pour garder l’humain au cœur des métiers de la création… Le regard de Gilles Poplin nous fait part de la manière dont Penninghen forme des créatifs capables de se jouer des mutations technologiques, tout en préservant la force de l’émotion et de l’imaginaire.

 

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Gilles Poplin / Crédit photo : Penninghen

JUPDLC : Tout d’abord, quelles sont les tendances actuelles dans le domaine de la création ? En tant que directeur de l’école Penninghen, pouvez-vous nous parler de votre vision du secteur ?

Gilles Poplin : Avec l’avènement des possibilités offertes par l’Intelligence Artificielle et les outils digitaux, les métiers de création sont en proie aux interrogations. Sur le plan de l’enseignement créatif et sur les perspectives pédagogiques offertes, notre mission demeure la même. Nous devons continuer à convoquer chez les étudiants l’acte volontaire en les aidant à s’affirmer en confiance.

 

JUPDLC : Pourquoi peut-on dire que Penninghen se positionne sur le marché avec une posture innovante ?

Gilles Poplin : Penninghen concentre tout son enseignement autour du principe de réalité et place l’étudiant au centre de ce précepte avec toute l’exigence et la maîtrise qu’il faut assumer et toutes les difficultés qu’il faut surmonter pour faire d’une pratique créative une activité professionnelle. L’acquisition des connaissances s’articule entre imagination et raison en ne laissant jamais l’une prendre le pas sur l’autre. L’observation par le dessin que nous mettons au cœur de tous nos cursus et tout au long du parcours de formation demeure la discipline privilégiée pour en prendre conscience. Le développement de la sensibilité est ainsi mis au service d’un pragmatisme professionnel. Les facultés de conception qu’offre la pratique du dessin ouvrent par la suite à un enseignement interdisciplinaire et des exercices pédagogiques spécifiques à notre école et qui font précisément la singularité de Penninghen et de ses diplômés.

 

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JUPDLC : Quelle est la promesse de l’école, qu’est-ce qui fait son ADN ?

Gilles Poplin : L’objectif de Penninghen est d’accompagner chacun à affirmer son caractère et s’élever grâce à une méthode qui place la pratique de la création au centre de ses enseignements pour en faire des professionnels de premier plan, en capacité d’intégrer les modèles de gouvernance des entreprises et guider des stratégies créatives cohérentes et efficaces.

 

JUPDLC : En 2024, comment parvenez-vous à faire la synthèse entre tradition artistique et création contemporaine ?

Gilles Poplin : La création requiert un effort et implique celui qui s’y engage. Abolir et recréer l’espace-temps, inventer un nouvel espace, implique un don total de soi. Penninghen s’inscrit dans une histoire longue et marquée par des éléments forts, des engagements et des visions audacieuses qui perdurent et qui continuent aujourd’hui de nourrir son audace pédagogique. L’ensemble des étudiants des trois formations est amené à réfléchir à la notion de patrimoine comme outil de modernité pour mieux comprendre le présent, considérant que le passé n’existe pas pour le créateur, que l’artiste découvre le monde comme s’il assistait à la cosmogonie, comme s’il était contemporain. Comme un éternel recommencement, il faut savoir considérer le patrimoine et l’histoire comme vecteurs de modernité et d’innovation.

 

JUPDLC : Quelles sont les formations dispensées au sein de votre école ? Comment contribuent-elles à former des créatifs qui soient polyvalents ?

Gilles Poplin : Penninghen propose 3 cursus : Architecture Intérieure, Stratégie Créative et Communication de Marque et Direction Artistique Image Média. Pour ces 3 formations en 5 ans, une approche interdisciplinaire et intercursus est proposée chaque année au travers de cours, de grands projets, de voyages d’études et de formats pédagogiques transversaux.

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Crédit photo : Jonathan Borba / Pexels

JUPDLC : Selon vous, quelles seront les grandes tendances créatives des prochaines décennies ?

Gilles Poplin : Sur le plan de l’innovation, il s’agira probablement d’envisager la création au travers de la mutation plutôt que de la voir par un prisme disruptif. Cela implique d’acquérir de nombreux protocoles d’échanges, interdisciplinaires, savoir considérer les émotions comme vecteurs d’interactions et de construction entre les individus, les métiers et leurs champs d’activités.

 

JUPDLC : Comment préparez-vous vos étudiants à ce futur ? Utilisez-vous des technologies, outils particuliers ?

Gilles Poplin : À Penninghen, nous considérons depuis toujours que le dessin est un langage à soi. L’appréhension, autrement dit la compréhension du réel par la pratique manuelle et l’approche sensible qu’elle induit, est une donnée essentielle dans notre apprentissage. Savoir appréhender le réel et le restituer « avec la main » est fondamental. Pour bien dialoguer avec une quelconque technologie, il ne faut pas y être inféodé, il est indispensable de savoir entrer dans une dialectique avec les outils et développer des méthodologies.

Pour moi, l’enseignement créatif se situe à la frontière des « arts mécaniques » et des « arts libéraux ». Il ne peut pas uniquement reposer sur un apprentissage technique. C’est une synthèse entre « être », « avoir » et « faire ». Il s’agit de faire converger l’intuition et la conviction par l’acte volontaire, celui du bon choix.

 

JUPDLC : Comment avez-vous fait de Penninghen une école d’excellence au positionnement « haut de gamme » ?

Gilles Poplin : Depuis 1956, Penninghen est une école de premier plan, ayant inculqué dès son origine l’exigence personnelle que requièrent les métiers de la création. Étant moi-même sorti diplômé de l’école en 1995, formé par d’exceptionnels professionnels, ayant occupé personnellement différentes fonctions et embrassé différents statuts au travers de ma pratique professionnelle de directeur artistique durant plus de vingt ans, j’ai acquis une connaissance des protocoles de création artistique accrue. Elle nourrit et renforce chaque jour ma vision pour Penninghen, perdurant et amplifiant les fondements de sa pédagogie, tout en favorisant son rayonnement ; l’emmenant vers des pratiques et des approches pédagogiques inédites et originales qui savent capter et anticiper les attentes des secteurs professionnels auxquels elle forme.

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Crédit photo : Adobe Stock / Spyrakot

Mon expérience m’a permis de réunir et de fédérer autour de Penninghen les plus grands créatifs contemporains en France et à l’international. Ils viennent à Penninghen, s’y impliquent et la soutiennent en confiance. Mon propre réseau, ouvert à la multiplicité des sensibilités et des approches, me permet de cultiver avec humilité l’idée que la création est partout et le partager avec les grands noms de la création et plus largement avec des décideurs qui recherchent la créativité. Après plus de trente ans d’expérience, il faut savoir veiller à sa fragilité pour lui donner toute sa puissance. Je m’y emploie quotidiennement.

 

JUPDLC : Quels seront, selon vous, les plus gros défis que devront surmonter vos élèves lors de leur entrée sur le marché du travail ? Comment les préparez-vous à relever ces défis ?

Gilles Poplin : La création procède du don de soi. Mon rôle est de rappeler sans cesse qu’il faut savoir comprendre ses émotions et les dominer, apprendre à savoir donner comme savoir recevoir. C’est indispensable dans les métiers de création qui sont des métiers d’équipe. Notre enseignement repose sur l’affirmation du caractère, bien entendu dans le respect de l’autre, obtenu par le travail, l’engagement et la responsabilité. Assumer une vision et la défendre.

 

JUPDLC : Comment est sélectionnée l’équipe enseignante ? Comment vous adaptez-vous aux évolutions du marché créatif ?

Gilles Poplin : Penninghen, tous les enseignants sont des professionnels en exercice. C’est d’ailleurs une condition à leur recrutement. Nos enseignants sont choisis pour piloter une discipline à la lumière de leur propre parcours, de leur propre sensibilité. Leur pratique et leur vision sont la garantie d’un ancrage dans l’époque et la réalité du métier ainsi que des évolutions du marché.

 

JUPDLC : Selon vous, quelle sera la place de l’intelligence artificielle dans le domaine créatif d’ici quelques années ?

Gilles Poplin : Tout comme le numérique, internet, l’IA est déjà partout… Sauf au creux de la main, au centre de l’œil et au fond de l’esprit, c’est-à-dire là où réside l’intelligence, se projette l’imagination et où siègent les émotions.

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